
En coulisse
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par Natalie Hemengül
Aujourd'hui, les femmes en ont assez de la contraception hormonale. C'est du moins ce qu'on pourrait penser. J'entends de plus en plus souvent parler de la « planification familiale naturelle », même en ligne par le biais d'influenceuses payées pour faire de la pub. Je suis un peu sceptique face à cette méthode, c'est pourquoi j'ai demandé l'avis d'une experte.
De jeunes influenceuses, tout sourires, dévoilent leur cyclogramme, leur appli et leur thermomètre basal devant la caméra et parlent à leurs followers de leurs expériences positives avec la méthode de planification familiale naturelle (PFN). Cette pub rémunérée m'intrigue un peu. Bien que je partage leur enthousiasme pour les méthodes de contraception sans hormones, je ne m'informe qu'à contrecœur avec des « contenus sponsorisés ». C'est pour cette raison que je décide de mener un entretien avec la gynécologue Dr. Mariele Keller pour découvrir quels sont les risques de cette méthode et à qui elle convient vraiment.
Dr Keller, quel est le principe de base de la méthode de planification familiale naturelle ?
Dr méd. Mariele Keller, médecin FMH en gynécologie et obstétrique :
La base de cette méthode est le cycle menstruel féminin avec ses jours fertiles et ses jours infertiles. Durant les jours fertiles, il s'agit en fait de renoncer aux relations sexuelles pour éviter les risques de grossesse ou de se protéger à l'aide d'autres méthodes de contraception telles que le préservatif ou le diaphragme. Le cycle menstruel dure en moyenne 28 jours dont seuls cinq à sept jours constituent la fenêtre de fertilité de la femme. L'enjeu est donc de parvenir à savoir aussi précisément que possible quels jours sont effectivement fertiles et lesquels sont infertiles. En outre, il est indispensable de prendre en considération le fait que le sperme a une durée de vie et une capacité de fécondation pouvant aller jusqu'à cinq jours.
L'expression « planification familiale naturelle » est-elle synonyme de « méthode symptothermique » ?
Je dirais que la « planification familiale naturelle » est l'hyperonyme de plusieurs méthodes qui permettent de découvrir quels sont les jours fertiles du cycle menstruel. La symptothermie en est la meilleure méthode et la plus sûre. En effet, cette méthode combine les observations de la température au réveil, c'est-à-dire la température basale, et celles de la glaire cervicale. Alors que certaines femmes utilisent la « méthode Billings » qui se base uniquement sur l'observation de la glaire, d'autres ne prennent note que des différences de température. Par ailleurs, une méthode hautement inefficace est la méthode Ogino Knaus qui consiste à déterminer la période féconde du cycle uniquement à l'aide du calcul de la longueur de ce dernier.
Dans quelle mesure la température basale ainsi que l'observation de la glaire cervicale jouent-elles un rôle dans la méthode symptothermique ?
Durant la deuxième phase du cycle, c'est-à-dire après l'ovulation, la température basale augmente de deux à cinq dixièmes de degré Celsius par rapport à la phase préovulatoire. La température doit donc être prise chaque matin avec un thermomètre médical et soit notée à la main dans un diagramme, soit enregistrée dans une appli destinée à cela. La prise de température peut être orale, vaginale ou rectale.
Seule une augmentation de la température durant trois jours d'affilée atteste que l'ovulation a bien eu lieu et que la période infertile commence : le couple n'a donc pas besoin d'avoir recours à une méthode de contraception supplémentaire. Avant l'ovulation, en revanche, il est beaucoup plus difficile de déterminer quand commencent les jours fertiles. Ainsi, il vaut mieux se protéger à l'aide d'une autre méthode jusqu'à ce que l'ovulation ait eu lieu. Seules les femmes avec un cycle menstruel très régulier peuvent calculer jusqu'à quel jour il est possible d'avoir des relations sexuelles non protégées sans risque durant la première phase du cycle.
La méthode symptothermique exige également l'observation de la glaire cervicale au niveau du col de l'utérus, car cette dernière se modifie durant la période pré- et post-ovulatoire. Beaucoup de femmes constatent que durant cette période la sécrétion de la glaire cervicale est plus élevée et que cette dernière devient plus filante, car perméable aux spermatozoïdes. Avant et après l'ovulation, en revanche, la muqueuse est rigide et fonctionne comme barrière naturelle. Grâce à l'observation de la glaire cervicale, il y a plus de chance que la température mesurée corresponde effectivement à l'ovulation.
La méthode PFN est-elle aussi efficace pour tomber enceinte que pour éviter une grossesse ?
Étant donné que la planification familiale naturelle se base sur les jours fertiles et infertiles, il est vrai qu'elle convient aussi bien comme contraception que pour planifier une grossesse. Dans le premier cas, on évite les relations sexuelles durant les jours fertiles ou on se protège davantage, dans l'autre, on planifie au contraire les relations sexuelles justement durant ces jours-là.
Quel indice de Pearl offre la PFN et avec quelles méthodes de contraception sans hormones peut-elle être comparée ?
La planification familiale naturelle peut difficilement se mesurer avec l'indice de Pearl. La fiabilité dépend de la précision et de la rigueur avec lesquelles la méthode utilisée est suivie. Lors d'une bonne utilisation de la méthode symptothermique, par exemple, l'indice de Pearl s'élève à 0,4, alors qu'en utilisation typique l'indice est de 1,8. En comparaison, le préservatif utilisé correctement a un indice de Pearl de 2, alors qu'en utilisation typique, l'indice est de 12. La méthode contraceptive sans hormones la plus efficace est le stérilet en cuivre qui offre un indice de Pearl entre 0,3 et 0,8.
À quel point les gestionnaires de cycle sont-ils fiables en comparaison avec l'appréciation personnelle de la phase du cycle dans laquelle on se trouve ?
Les applications et les gestionnaires de cycle facilitent la prise de données de la température et de l'observation de la glaire. Toutefois, il convient d'avoir une bonne connaissance de la méthode, d'interpréter de manière responsable les données et de rester vigilant.
Pour quelle population cette méthode est-elle adaptée d'après vous ?
Cette méthode convient bien aux femmes dont le cycle est stable et régulier. Cela dit, elle exige la responsabilité conjointe du partenaire pour ce qui est des méthodes barrières ou de renoncer à des pratiques sexuelles risquées durant la période féconde. Une relation stable avec une bonne discipline et la volonté d'en apprendre plus sur le corps humain durant une période relativement longue de la part des deux partenaires représentent bien entendu un avantage.
Existe-t-il des conditions dans lesquelles la méthode peut être altérée ?
Cette méthode ne convient pas aux femmes qui viennent d'accoucher, celles qui sont dans la puberté ou en ménopause, ou encore ayant des cycles très irréguliers et qui ovulent rarement. En outre, les femmes avec un rythme de vie irrégulier, par exemple dû au travail posté, qui font de petites nuits ou qui voyagent beaucoup ne devraient pas utiliser cette méthode. Le stress et les maladies peuvent mener à des dérèglements des cycles et altérer les appréciations des résultats.
Quels sont les avantages de cette méthode ?
Personnellement, je trouve que cette méthode permet aux femmes de mieux comprendre et appréhender leur corps. Par ailleurs, elle est économique tant qu'on n'investit pas dans un appareil d'évaluation des résultats et n'a aucun effet secondaire à l'exception d'une potentielle grossesse non désirée.
Quels en sont les risques ?
À mon avis, le plus grand risque réside dans le fait qu'on puisse voir les jours infertiles à la hausse et risquer ainsi une grossesse non désirée. Idéalement, il faudrait compter un temps d'apprentissage et de formation de trois mois, c'est-à-dire sur une durée de trois cycles. C'est un délai passablement long, mais réaliste. De plus, un stress peut s'installer au sein du couple, si l'on ne sait pas si et quand l'ovulation a eu lieu. Il est très important de noter que la méthode symptothermique ne protège pas contre les maladies sexuellement transmissibles.
Avez-vous l'impression, en tant que médecin, que ce sujet préoccupe de plus en plus de personnes aujourd'hui ou ne serait-ce que le cas dans mon entourage proche ?
Je constate qu'en général mes patientes s'intéressent de plus en plus à la contraception sans hormones, surtout en ce qui concerne la demande de stérilet en cuivre. De plus en plus de femmes considèrent la prise journalière d'hormones comme une intrusion étrangère dans leur intimité et y attribuent des effets secondaires tels que les baisses de moral, la perte de libido, la prise de poids ou encore la perte du « je ». Le souhait de se réattribuer et de mieux comprendre son propre corps est très présent à notre époque. Les femmes dans une relation stable et ayant des projets familiaux à court ou moyen terme ainsi que les femmes souffrant d'effets secondaires de la contraception hormonale constituent des groupes cibles typiques de cette méthode.
Quelle approche conseillez-vous aux femmes désireuses de passer à la PFN ?
Bien qu'Internet offre de nombreuses informations sur le sujet, rien ne remplace une discussion personnelle avec un gynécologue. L'échange avec d'autres personnes sérieuses utilisant cette méthode et leur soutien peuvent aussi se révéler très utiles.
En tant que fan de Disney je vois toujours la vie en rose, je vénère les séries des années 90 et les sirènes font partie de ma religion. Quand je ne danse pas sous une pluie de paillettes, on me trouve à des soirées pyjama ou devant ma coiffeuse. PS Le lard est un de mes aliments favoris.