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Alerte aux fourmis : faire fuir les envahisseurs

La grande invasion a commencé et cette année, les fourmis semblent trouver de nombreux foyers à leur goût. Gabi Müller, experte en nuisibles, nous présente ses méthodes.

Soudain, le sol est jonché de petits points noirs. Elles sont partout. Les fourmis peuvent être une véritable plaie. Imaginez si vous deviez subir ça à longueur d’année, et ce depuis 25 ans. L’horreur, non ? Pas pour Gabi Müller, qui travaille au service de prévention contre les nuisibles du Canton de Zurich depuis un quart de siècle déjà et le dirige depuis 18 ans.

Gabi Müller est fascinée par les nuisibles.
Gabi Müller est fascinée par les nuisibles.
Source : ville de Zurich

Chaque année, le service reçoit plus de 200 demandes au sujet des fourmis. Les habitant·es du canton peuvent contacter le service de Gabi Müller par téléphone, ou bien par courrier lorsqu’il s’agit de faire identifier un spécimen. « Les fourmis sont le deuxième insecte au sujet duquel on reçoit le plus de demandes après les guêpes », précise Gabi Müller.

Chasser les fourmis n’est cependant pas chose aisée. Et pour cause, chaque espèce de fourmis réagit à différents produits et il arrive que leurs goûts changent, au sein même d’une colonie. Ainsi, un appât qui fonctionnait peut s’avérer totalement inefficace un mois plus tard. Alors, que faire ?

Première étape : l’identification

« La première étape consiste à distinguer les fourmis indigènes des fourmis exotiques », explique Gabi Müller.

Les fourmis indigènes

Les fourmis d’origine locale sont généralement bicolores : noir, brun-rouge, noir. En Suisse, les espèces les plus fréquentes sont : Lasius niger, Lasius emarginatus et Lasius brunneus. On les trouve souvent sur les balcons et dans les maisons dès le printemps, alors qu’il n’y a pas encore assez de nourriture à l’extérieur. Voici à quoi elles ressemblent :

On reconnaît les « Lasius emarginatus » à leur corps bicolore.
On reconnaît les « Lasius emarginatus » à leur corps bicolore.
Source : ville de Zurich

Les fourmis exotiques

Les fourmis exotiques sont généralement plus petites et d’une seule couleur. Elles sont actives du printemps à la fin de l’été dehors et le reste de l’année en intérieur. Les petites fourmis de couleur ambrée demandent une grande vigilance. Il pourrait s’agir de fourmis pharaons, Monomorium pharaonis, capables d’envahir des pâtés de maisons entiers. Voici à quoi elles ressemblent :

La robe des fourmis pharaons est d’une couleur ambrée tirant vers le doré.
La robe des fourmis pharaons est d’une couleur ambrée tirant vers le doré.
Source : canton de Zurich

La Tapinoma nigerrimum pique et est particulièrement invasive. Winterthour en fait d’ailleurs les frais depuis que plusieurs colonies ont infesté la ville qui peine à les combattre. Le plus sournois dans tout ça, c’est que cette espèce ressemble énormément aux fourmis indigènes Lasius niger :

La « Tapinoma nigerrimum » se propage à une vitesse fulgurante et n’hésite pas à mordre.
La « Tapinoma nigerrimum » se propage à une vitesse fulgurante et n’hésite pas à mordre.
Source : canton de Zurich

Identifier une espèce exacte n’est, bien sûr, pas une mince affaire pour un·e profane. Lorsque vous soupçonnez la présence d’une espèce de fourmis exotiques, il est important d’agir rapidement. « Le mieux est de faire identifier les fourmis par des spécialistes, par exemple dans un musée d’histoire naturelle ou auprès d’une entreprise de lutte contre les nuisibles. Veillez à ce que la personne qui identifie les fourmis dispose d’un permis fédéral pour l’emploi des pesticides », explique Gabi Müller.

Lorsque vous soupçonnez la présence d’une espèce de fourmis exotiques, il est important d’agir rapidement.

Toutefois, dans la plupart des cas, l’intervention d’un·e spécialiste n’est pas urgente. « Lorsque l’on découvre des fourmis indigènes au printemps, mieux vaut attendre », explique Gabi Müller. « Elles disparaîtront aussi vite qu’elles sont arrivées dès qu’il y aura de nouveau de la nourriture dehors. »

Il arrive cependant qu’elles restent.

Deuxième étape : la lutte

À éviter : les remèdes maison d’Internet

Si des fourmis indigènes ont décidé d’élire domicile chez vous, il existe de nombreux moyens de les en chasser. On trouve quelques solutions à concocter à la maison sur Internet :

  • poudre à lever et sucre en poudre,
  • cannelle,
  • menthe séchée,
  • purin d’ortie,
  • alcool à brûler et détergent.

Gabi Müller est sceptique quant à ces produits miracles maison. Ces méthodes peuvent fonctionner dans certains cas, mais les produits chimiques sont plus efficaces.

Des produits chimiques efficaces

Les produits chimiques contre les fourmis ne manquent pas :

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Quels sont ceux qui fonctionnent et ceux qu’il vaut mieux éviter ?

« Le calfeutrage suffit rarement. Les fourmis arrivent généralement à rentrer ou trouvent un autre passage », explique Gabi Müller. « Les sprays ne sont pas beaucoup plus utiles. » Ils ne tuent que des ouvrières isolées, tandis que la reine, qui se trouve dans le nid, continue à se reproduire. Tuer des fourmis devant un appât peut même s’avérer contre-productif. En effet, la vue des fourmis mortes dissuade leurs congénères de s’approcher du piège. Selon Gabi Müller, l’appât serait d’ailleurs la solution la plus simple et la plus efficace.

Les appâts à fourmis sont la solution la plus simple et la plus efficace.
Gabi Müller, biologiste et spécialiste de la lutte contre les nuisibles

Il n’est pas facile de dire quel appât sera le plus efficace. « Les fourmis ont des goûts individuels et il n’existe pas de solution miracle. Il faut les tester et trouver celui qui fonctionne. »

Trouver le meilleur appât

L’idéal est d’acheter des appâts de plusieurs marques différentes. Disposez-les ensuite dans les endroits où les fourmis se concentrent et surveillez-les pour voir quels appâts les attirent. Si au bout de quelques jours, vous voyez plus de fourmis, c’est bon signe. Cela signifie que l’appât fonctionne, mais cela veut aussi dire qu’il se videra plus rapidement. Continuez donc à observer la fréquence des visites et dès qu’elle diminue, cela signifie qu’il est temps de remplacer l’appât (au bout de 14 jours généralement). Vous savez désormais quelle marque plaît à vos envahisseuses.

L’idéal est d’acheter des appâts de plusieurs marques différentes.

Le « remède miracle »

Selon Gabi Müller, les appâts en gel sont encore plus efficaces, mais seuls les professionnel·les sont autorisé·es à les utiliser, dans la lutte contre les espèces exotiques par exemple (voir ci-dessus). Les colonies exotiques comptent plusieurs reines et se propagent bien plus rapidement. Ces espèces sont très invasives.

Troisième étape : la prévention

Mieux vaut tenir les fourmis à l’écart que les tuer. Là encore, il n’existe pas de solution miracle. Gabi Müller a toutefois quelques conseils :

  • bien fermer les aliments contenant du sucre et essuyer les taches sur les surfaces ;
  • éliminer les pucerons des plantes. Les fourmis adorent se nourrir de leurs excréments (miellat). Il arrive même qu’elles entretiennent des troupeaux de pucerons, comme nous le faisons avec les vaches, et les défendent de leurs prédateurs ;
  • laisser un espace entre la végétation et la façade de la maison. Une bande de graviers régulièrement désherbée d’environ 50 centimètres de large est idéale. Cela complique l’accès des fourmis ;
  • bien surveiller les endroits abrités comme les accès aux isolations ou les zones avec du bois. Les insectes s’y installent volontiers.

Éviter d’importer des espèces exotiques

Gabi Müller insiste sur l’importance de ne pas introduire d’espèces de fourmis exotiques en Suisse. Elle conseille donc d’éviter d’importer des plantes en pot de l’étranger. « La terre du petit olivier que vous avez rapporté de vos vacances en Italie peut contenir des insectes. J’ai même été appelée plusieurs fois dans le nord-est de la Suisse pour des termites du sol qui étaient probablement arrivés en Suisse via la terre de plantes en pot », explique Gabi Müller.

L’importation de termites peut devenir un problème massif.
L’importation de termites peut devenir un problème massif.
Source : Shutterstock/Witsawat.S

La biologiste impute le nombre grandissant de demandes à son service constaté ces trois dernières années à l’introduction d’espèces étrangères et au réchauffement climatique. Au premier semestre 2023, le service a déjà reçu 195 appels. Les 207 demandes comptabilisées l’année dernière pourraient donc bientôt être dépassées.

La biologiste est néanmoins ravie que la réputation des insectes en général se soit améliorée. « Avant, les gens voulaient purement et simplement éliminer les guêpes. Aujourd’hui, on reçoit plus de demandes pour les déplacer. »

La fourmi, un insecte utile

Les insectes sont de véritables touche-à-tout. Les fourmis forment de l’humus et aèrent la terre, elles répandent les graines de plantes sauvages, mangent des parasites et font elles-mêmes partie de la chaîne alimentaire.

Alors, la prochaine fois que les fourmis vous font tourner en bourrique, n’oubliez pas que sans leur grouillement, notre monde pourrait bientôt s’arrêter.

Comment luttez-vous contre les fourmis chez vous ? N’hésitez pas à partager vos techniques en commentaire !

Photo d’en-tête : Shutterstock/Roberto Piras

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J’aime tout ce qui a quatre pattes et des racines. La lecture me permet de plonger dans les abîmes de l’être humain. Je déteste les montagnes : elles ne font que cacher la vue sur la mer. Quand j’ai besoin d’air frais, je vais le respirer au sommet d’un phare. 


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